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La Petite Casserole d’Anatole

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C’est bien connu, on traîne parfois une casserole. C’est le cas d’Anatole. La sienne est rouge, jolie, elle lui est tombée dessus comme ça, un jour. On n’y peut rien, c’est la vie.
Mais depuis qu’il l’a, les gens ne regardent plus qu’elle et Anatole sent bien qu’elle les fait parler derrière lui, le rend étrange aux yeux des autres, que plus il la traîne et plus il est assimilé à cet ustensile de cuisine. Et puis elle le ralentit aussi, l’empêche de courir ou de grimper au même rythme que ses camarades. Elle l’énerve, le rend colérique voire même méchant parfois…
Alors Anatole est-il une vraie casserole ? Cette érubescence dont elle se pare le portera-il au rouge vif ? Sa vie est-elle foutue ? Doit-il se cacher pour toujours pour qu’on l’oublie à jamais ?

Anatole sait qu’on ne peut pas se débarrasser d’une casserole. Mais d’autres le savent également. Ces «personnes extraordinaires», adultes, le savent car elles en ont une aussi, depuis de longues années et qu’elles ont appris à vivre avec. Anatole va donc l’apprendre, le comprendre et son ustensile de cuisine va petit à petit devenir indispensable, pour ne pas dire identitaire…

C’est avec beaucoup d’intelligence et d’humour qu’Isabelle Carrier file la métaphore de cette casserole traînée pour expliquer aux plus jeunes ce qui fait qu’ils sont eux-mêmes.
Cette très belle histoire démontre qu’il y a peu du défaut à la différence, et que celle-ci sera le terreau de notre identité, de nos capacités et de nos qualités, si on sait l’accepter et la comprendre pour mieux l’utiliser en décelant ses faiblesses pour les compenser, et ses points forts pour en profiter.
L’album est peut-être en bande dessinée, car l’autre leçon est de savoir dialoguer et écouter pour mieux bouger. Comme une adéquation du fond et de la forme donc, pour une casserolée profitant de cette neuvième chose dialogique et séquentielle décrivant mieux une forme d’autonomie à acquérir. Le dessin aux crayons de couleurs joue de la simplicité, d’une légèreté qui assoie avec élégance l’évidence d’une leçon de vie qui peut se cacher dans le langage et son utilisation métaphorique d’un objet de tous les jours, qui se rappellera désormais comme fait pour mijoter un contenu plutôt que de l’afficher plus ou moins faussement. La vie comme un bon petit plat donc, où il est moins affaire de vue que de ce goût au bout de cette langue portant les papilles et articulant les mots.

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Chroniqué par en avril 2009