Le Schtroumpfissime

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Quand il faut parler d’un album des Schtroumpfs, c’est souvent celui-ci qui vient. Considéré comme une des meilleures fables politiques de la bande dessinée pour enfant, Le Schtroumpfissime a une place à part dans la série. Les éditions Dupuis semblent en avoir conscience puisqu’elles ont publié voici quelques mois une version commentée par Hugues Dayez, critique bien connu des amateurs de lutins bleus.

L’objet est beau, présenté dans un grand format avec le texte à gauche et une planche à droite. L’album en lui-même n’est pas une surprise, le scénario d’Yvan Delporte est toujours aussi réussi, le dessin de Peyo à son meilleur. On redécouvre avec plaisir des situations connues, le schtroumpf à lunettes à un niveau de flagornerie rarement atteint, la critique des arcanes du pouvoir toujours actuelle. Bien sûr cela reste une œuvre pour enfant et on aurait tort d’en faire un monument de subtilité, comme cela a été trop dit, mais la dénonciation est assez fine, et surtout assez drôle, pour ne jamais plomber l’action.

Sur l’apport du texte de Dayez, le résultat est plus mitigé. Sur la forme, le choix d’alterner une page de texte et une planche ne fonctionne pas si bien. Tout d’abord, le rythme s’en retrouve systématiquement cassé, même la narration de Peyo permet à chaque planche de rester intelligible. Cependant, en imposant une confrontation entre un texte critique en page de gauche et une planche en page de droite, on s’attendrait logiquement à un commentaire précis – planche par planche – du Schtroumpfissime. En réalité, le texte dépasse largement ce cadre pour aborder l’itinéraire de Peyo, ses influences générales et sa gestion du succès des Schtroumpfs. Plusieurs passages s’attachent à analyser précisément le détail de la planche en regard, mais ils ne sont pas majoritaires, et font d’autant plus regretter leur rareté. Bien sûr, une contextualisation est toujours utile, mais dans ce cas le découpage utilisé était-il bien nécessaire ? Une longue pré- ou postface aurait évité de dénaturer l’album, tout en ne créant pas d’ambiguïté quant au contenu du texte.

Ne nous braquons pas pour autant — les documents présentés sont intéressants et le texte est bon (Dayez connaît son sujet), sans pour autant proposer un texte critique poussé. Il faut seulement ne pas se tromper sur la marchandise, en espérant y trouver des éléments inédits. Le néophyte curieux sera certainement comblé par cette édition et y trouvera des informations pertinentes et de belles images. Par contre, ceux qui souhaiteront une étude plus approfondie peuvent passer leur chemin et se reporter directement à l’excellente biographie de Peyo[1] réalisée par le même Dayez il y a quelques années.

Notes

  1. Peyo l’enchanteur aux éditions Niffle, coll. «Profession», 2003.
Site officiel de Dupuis
Chroniqué par en décembre 2011