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La Science Infuse (n°8, 9 et 10)

de

La science infuse. Au risque d’être ridicule, personne ne peut prétendre l’avoir. Elle servira bien plutôt d’argument tout fait pour mettre fin à celui qui en sait trop, voire qui en dit trop au point d’énerver son auditoire.
Mais pour les amateurs de thé ou des tisanes du soir, infuser c’est ce qui se répand dans un liquide chaud. Que la science et son discours puissent infuser à la manière d’un sachet de thé ou d’une tisane aromatisée dans la noosphère surchauffée par la crainte et/ou la curiosité, peut donc devenir une métaphore pertinente dans notre univers quotidien qui a souvent été façonné aux noms des sciences et techniques, pour le pire ou le meilleur. Oui, la science infuse car elle reste encore le discours de référence à l’échelle collective, celui de «l’expertise» comme on dit, auprès duquel on cherche la/une vérité quand tout va de traviole.
Bien sûr, pour les épistémologues il s’agit là d’une bêtise. Ce que le quidam appelle une vérité scientifique, n’est pour le scientifique lui-même que ce qui est le plus probable, ce dont on n’a pas ou pu prouver/expérimenter le contraire.
La science infuse donc têtes et âmes d’une biosphère surchauffée par l’action anthropique, mais dans ce paradoxe où on lui demandera de dire la vérité et rien que la vérité, pour ensuite lui reprocher légitimement de ne pouvoir la dire.

Si tout cela restait entre scientifiques, on en rirait comme d’un match de catch à l’emphase calculée et rassurante. Mais quand cela se passe à l’échelle planétaire, cela concerne désormais tout le monde. L’écologie, au-delà de cette image folklorique des protecteurs de la nature bien pratique auxquels on l’a longuement cantonnée, reste l’irruption de faits scientifiques dans le champ politique, qui constate que l’on vit dans un système fini, dont les quarante dernières années passées sans marcher sur la Lune montre que l’on n’est pas prêt d’en sortir. Il va donc valoir vivre ensemble à l’heure où la politique n’a jamais autant été du «diviser pour régner».

L’écolozine de Jean Bourquignon constate un peu tout cela à l’échelle individuelle, dans un pays préfigurant un supranational nécessaire et en même temps se divisant comme jamais entre Wallons et Flamands.
Comme en beaucoup d’autres, la science a infusé en cet auteur et il sait comme un écologue que tout acte s’inscrit dans le système de la demeure monde.[1] Cela le préoccupe beaucoup, et comme la science est un travail en court et que ses affirmations sont souvent contradictoires, cela le déboussole tout autant. Ajoutez à ce fait que beaucoup d’autres n’ont pas ses préoccupations et surtout — le plus souvent, il faut en convenir — les nient au nom de leur petit confort affiché en certitudes, et vous avez des pages cathartiques où le jet d’accros au téléphone mobile du haut d’un escalator devient un grand plaisir, même si tout de même encore un peu coupable.

Car oui, précisons-le, La Science Infuse pratique l’humour photocopié sur papier certifié provenant de forêts gérées durablement. Un humour écologique, c’est-à-dire de la complexité et/ou d’une pensée des causes et des conséquences. Pas de solutions pour vivre «écolo» comme on dit partout ailleurs en ce moment, mais de l’humour vertement sans complexe de complexifié, dans ce monde simpliste déterminé à faire du vert un folklore ou une couleur de bonimenteur communicant, pour continuer à vivre dans ce «toujours plus et après moi le déluge». Petite Gueule ouverte de l’autodérision ? Analyse à charge et par la bande de l’actualité polluante ? Un peu des deux, mais surtout un moyen (simple et naturel) de se mettre au vert en noir et blanc, pour essayer que le pire du probable ne se vérifie pas un jour par l’expérience.

Notes

  1. Home en globish.
Site officiel de Jean Bourguignon
Chroniqué par en juillet 2009