Parasite

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Ils sont parmi nous.
David Vincent avait ses visiteurs, Izumi Shin’ichi a ses parasites (les « Kiseijû » du titre). L’un comme l’autre sait ce que le monde ignore — «ils» sont parmi nous. Venus de l’espace, cachés sous l’apparence de gens comme vous et moi, mais différents. Monstrueux.
Cependant, oeuvrant pour une conspiration dont les tenants et les aboutissants restaient obscurs, les «visiteurs» de David Vincent avaient le bon goût de succomber sans trop de résistance et disparaissaient sans laisser de trace, consummés par un ultime halo rouge.
Les motivations des parasites sont, quant à elles, beaucoup plus primaires et évidentes : se nourrir (de chair humaine, le plus souvent), et éventuellement se défendre. Pratiquement invincibles, capables de se déformer à volonté, ils deviennent d’impitoyables machines à tuer, laissant derrière eux une traînée de sang et de cadavres.

Comme David Vincent, Izumi Shin’ichi les a vus. Mais ici, pas de raccourci que l’on ne trouvera jamais — c’est dans sa chair même que Shin’ichi découvre la vérité, puisque l’un des parasites a pris résidence dans son bras droit. Cohabitation forcée, puis collaboration, et ces deux héros en un seul vont tenter de mettre fin aux agissements des visiteurs des environs.
Commence alors une quête sanglante dans laquelle, comme dans The Invasion of the Body Snatchers, le monstre peut se cacher derrière le visage de proches que l’on cotoie tous les jours. De par sa relative brièveté (10 volumes «seulement»), la série évite de tomber dans la surenchère facile où se succèderaient des parasites de plus en plus puissants, et se renouvelle suffisamment pour maintenir tension et variété dans la narration. Mais c’est plus au niveau de l’impact visuel qu’elle se montre une réussite, dépassant un dessin pas toujours très assuré.

Déjà, dans Mikan («Inachevé», l’une des histoires courtes du recueil Hone no Oto), Iwaaki Hitoshi abordait le sujet du rapport au corps dans une histoire de sculpture et de modèle. Ici encore, c’est finalement le corps que l’on retrouve au centre de l’histoire, alors que le trait de l’auteur malaxe les chairs, empruntant tout ce que le genre animal a de tranchant, perçant, mordant, griffant, pour créer ses créatures de cauchemard. Pas complètement inhumaines, résolûment monstrueuses, elles rejoignent les visions d’Enfer de Hieronymus Bosch.

Parue il y a une dizaine d’années, il est indéniable que Kiseijû accuse aujourd’hui son âge face à la sombre élégance de séries plus récentes comme MPD-Psycho. Néanmoins, restent la retenue de sa narration et une certaine naïveté (notamment dans le traitement du duo central formé par Shin’Ichi et son parasite), et surtout une qualité du récit qui hausse le magnus opus de Iwaaki Hitoshi bien au-dessus des défoulements inutiles que peuvent être les actuels ARMS et autres Gantz.

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Chroniqué par en novembre 2001