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Un Privé à la Cambrousse (t3) Le Bolet de Satan

de

Troisième volume des enquêtes d’un privé à la cambrousse. Heitz dessine comme il écrit, et ses personnages magouillent comme ils respirent.
Heitz fait du petit mickey maousse, car cette cambrousse vous fout la frousse. C’est une jungle, c’est une brousse et quand tu la secousses elle mousse, et rien de maousse dans tout ça, juste de la petitesse, de la petite mousse, celle de la jalousie de voisinage, des sourires faux et des regards en coin. Tout se sait, alors on vous cache tout, on vous dit rien, vous connaissez cette autre chanson.

Ça se passe dans les années 50, le rural y était fondamentale car plus de la moitié de la population y vivait.
Hubert venu à l’enquête par hasard (Un privé à la cambrousse), y a pris goût. Au village on se fout de sa gueule. Pensez donc ! Ce vieux gars qui vit avec son frangin encore plus con et hargneux depuis que sa femme l’a quitté. N’empêche qu’il trouve le Hubert, et qu’on sait le trouver quand ça va pas. Et dans Le bolet de Satan l’enquête n’est pas banale, du premier choix, pas du signe de piste pour scouts ! Faut en avoir dans la cafetière, moi j’vous l’dit !
Comme dans Le corbeau de Clouzot, on y échange des mots, des lettres. Mais là, la matière y est plus dense, car elle est de plomb, et plus rapide, car propulsé par un fusil. Refonte subtile, littérale et à la lettre, le scénario de Heitz vous collera le nez aux pages en vous montrant une police de caractère (typographie).

De par son dessin, de par sa technique, Heitz fait plus dans la situation que dans le psychologique. Ce qui intéresse Heitz, c’est le village ou la petite ville de campagne comme première marche vers le civilisé. Après il y a la ville moyenne (préfecture) puis la grande ville (la capitale). D’une nature trop différente, si on y met les pieds on s’en va le plus vite possible (Magouilles pas ordinaires). Trop de civilisation tue la civilisation ?
Heitz ne dépasse pas le village, qui pour lui est la frontière avec la nature, celle où il y a les bêtes. Chassez le naturel (je ne vous souhaite pas d’être chasseur) et il revient au galop. Les bêtes peuvent alors envahir la ville (boucherie-charcuterie même combat, même éditeur) pour devenir hommes (chasseurs en plus !) et les hommes devenir bêtes, s’entretuer, s’entre-dévorer.
A force de faire des livres pour enfants Heitz a gardé le goût de la fable, de l’animal humanisé. Aujourd’hui il montre l’inverse l’humanité animal. Mais tendance porcins (omnivore) plutôt que félins.
Qu’on se le dise Heitz c’est Macherot et Autheman fusionnés.

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Chroniqué par en novembre 1998