Shin Nozokiya

de

La lecture de Nozokiya (Voyeur) de Yamamoto Hideo, m’avait laissé partagé. Le récit se séparait en deux parties aux tons et aux sujets bien différents. La première partie du volume, de loin la plus fascinante, suivait l’initiation d’un jeune homme, initiation qui prenait un sens quasi-mystique, dans la lignée du Fenêtre sur Cour d’Hitchcock.
Il ne s’agissait pas de devenir voyeur — mais plutôt d’ouvrir les yeux sur un autre monde, le monde grouillant derrière les façades, derrière les mensonges. Il ne s’agissait pas du plaisir coupable d’observer sans être vu — mais plutôt de la vérité, une vérité que l’on préfèrerait ignorer. Car une fois entr’aperçue la face sombre, impossible de retrouver l’innocence originelle, impossible de poser le même regard sur son entourage.
Dans la deuxième partie du volume, Yamamoto Hideo tentait de prolonger l’histoire — mais l’on ne peut être initié qu’une seule fois, et le récit devenait alors beaucoup plus banal et convenu, tournant au simple thriller saupoudré d’action et d’un soupçon de sexe.

Malheureusement, la série qui suit Nozokiya, intitulée Shin Nozokiya, est dans le prolongement de cette seconde partie, et abandonne quasiment la noirceur qui faisait toute la force du premier récit. Faisant preuve d’un humour potache souvent proche du graveleux, mettant désormais en scène une équipe de voyeurs pas terriblement éloignée de l’Agence Tous-Risques, Yamamoto Hideo ne réussit à garder l’intérêt du lecteur que grâce à ses «méchants». Hitchcock, encore lui, disait qu’un film ne tenait souvent que par son «méchant» — mais Shin Nozokiya prouve, s’il le fallait, que ce n’est pas toujours suffisant.
On préfèrera donc oublier cette suite bien dispensable, pour se tourner vers la dernière série en date de Yamamoto Hideo, Koroshiya Ichi, plus prometteuse.

Chroniqué par en septembre 2001