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Ed the Happy Clown

de

« So gentlemen, we have here a momentous occasion but also a big problem … how to present a story which has mountains of feces, people crawling through anuses and a talking penis to a television audience. » (p. 142)

Et bien oui. Il y a tout ça dans Ed the Happy Clown, et bien pire des pygmées cannibales et rativores, du sexe et des femmes nues, des mutilations en tout genre. Mais aussi une leçon très intéressante sur « Comment reconnaître un ver de terre d’un piano à queue ? », des chasseurs de vampire au chômage, un dimension peuplée (horreur !) d’homosexuels … et Ed, qui comme Candide, ne va cesser de tomber de Charybde en Scylla, victime innocente d’événements qui le dépassent.

A la première lecture, Ed the Happy Clown apparaît comme un délire d’adolescent, tiraillé entre ses pulsions sexuelles, ses envies de violence et sa fascination pour le scatologique. Le dessin, tout d’abord peu assuré, souligne cette impression d’oeuvre immature.

Mais plus on avance dans cette histoire surréaliste, plus on découvre la finesse de Chester Brown. Comme pour Lapinot et les Carottes de Patagonie, nous avons ici une oeuvre qui se construit au fur et à mesure, qui prend de la profondeur et se structure alors que Chester Brown gagne en maîtrise. Et si les quelques premières pages sont peu engageantes, on a du mal à poser ce livre une fois lancé dans l’histoire principale du recueil.

Et derrière cette façade en forme de farce immature, on découvre alors quelques interrogations plus profondes, des inquiétudes réelles sur l’amour, la tolérance, la violence, l’espoir … et l’on aperçoit, sous le masque du clown au rire gras, une véritable sensibilité.

Chroniqué par en février 1998