James Kochalka

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American Elf

Le 26 Octobre 1998, James Kochalka décide de se lancer un petit défi : dessiner, jour après jour, un strip de quatre cases inspiré de son quotidien. Dix ans plus tard, ce «cartoon diary» a résisté à la naissance de deux enfants et continue à égréner les petits riens de la vie, en marge des autres projets de l’auteur. Discussion autour de l’intime.

Nicolas Verstappen : Il semble que vous ayez connu quelques difficultés à trouver un éditeur aux Etats-Unis pour publier les carnets d’American Elf. Vous présentez d’ailleurs dans l’un de vos strips une séquence où l’on assiste au refus de Chris Oliveros, le responsable éditorial de Drawn & Quarterly.[1]

James Kochalka : La difficulté de trouver un éditeur pour mes carnets est liée au fait qu’ils ne prennent pas l’aspect d’un roman graphique mais d’un ensemble de strips. Dans un premier temps, les éditeurs ont donc éprouvé une certaine difficulté à se prononcer sur le concept.
Le fait que Chris Oliveros ne désirait pas les publier n’est pas entièrement exact. Il ne parvenait tout simplement pas à se décider. Un jour, je l’ai donc contacté et j’ai pris la décision à sa place. Je lui ai dit «Tu ne veux pas l’éditer» et nous en sommes restés là. Avec un peu de recul, j’en suis arrivé à la conclusion que j’aurais dû le convaincre de se lancer dans ce projet plutôt que de l’en écarter. Cinq minutes plus tard, j’ai donc contacté Chris Staros, le responsable éditorial de Top Shelf.[2] Il avait déjà refusé mes carnets mais, au bout de quelques instants, je l’ai persuadé de revenir sur sa décision.

NV : Avant d’être compilés dans des recueils, vos strips sont publiés jour après jour sur votre site web. Considérez-vous internet comme un espace d’édition autosuffisant ou envisagez-vous le support du livre comme la véritable finalité de votre travail ?

JK : C’est le strip qui doit être envisagé comme la base de mon travail. Le site web est le moyen le plus rapide et le plus direct pour présenter ce strip aux lecteurs. Le livre est un autre support qui permet d’atteindre un public. L’avantage du site internet tient de son immédiateté. Celui du livre tient de son caractère à la fois permanent et intime.

NV : Dans le XeroXed #1, Joe Matt écrivait : «Je vois la génération qui me succède comme étant plus libre, moins névrosée, moins rebelle et ayant une approche de la Bande Dessinée qui privilégie le dessin de manière bien plus importante que l’écriture». Vous sentez-vous plus proche de la génération de Joe Matt ou de celle qui lui succède ?

JK : Hum… Je ne sais pas trop. Pour autant que je sache, je suis peut-être plus âgé que Joe Matt. J’aurai 37 ans le mois prochain [en avril 2004]. Je dirais simplement que la vie a été très généreuse avec moi. Je suis libre ET rebelle. Je me révolte contre tout ce qui tente d’imposer des limites à mon bonheur, mes explorations artistiques, mon travail et mon «terrain de jeu».

NV : Vous avez participé à deux livrets baptisés Conversation[3] où vous échangez vos réflexions sur la Bande Dessinée avec Jeffrey Brown[4] et Craig Thompson.[5] Ce dernier signalait faire partie de la génération «Understanding Comics», une génération d’auteurs qui attacherait plus d’importance à la théorie que celle qui la précède. Partagez-vous ce sentiment ?

JK : Je porte en effet un grand intérêt à la théorie… car j’aime réfléchir, tout simplement. Je suis intelligent sans être un intellectuel. Je suis un penseur ludique.

NV : Dans mon souvenir, Top Shelf avait annoncé un troisième de ces carnets dessinés à quatre mains. N’étiez-vous pas supposé rencontrer Frank Miller pour un nouvel échange ?

JK : Frank devait en effet succéder à Craig et à Jeffrey mais il s’est cassé un bras. Sa carrière dans le cinéma a ensuite pris son envol et nous en sommes restés là.
J’ai alors entamé un carnet avec Tom Devlin,[6] mon ancien éditeur (il dirige Highwater Books et est aussi un auteur très doué). Tom a malheureusement abandonné après la deuxième planche. Plus récemment, j’ai débuté un carnet avec Jeff Smith.[7] A la cinquième planche, son emploi du temps ne lui a plus permis de poursuivre. J’ai bon espoir que ce carnet voie cependant le jour.

NV : Pour en revenir à American Elf, comment avez-vous envisagé l’idée de dessiner un strip par jour ? Cela tient-il pour vous d’une forme de «rituel» qui apaiserait votre anxiété naturelle ?

JK : Je ne qualifierais pas mon approche de «cathartique». Là où d’autres personnes structurent leur vie au travers de leur métier, j’y parviens par l’écriture quotidienne de ces carnets. Ils forment une trame indissociable du tissu de mon existence.

NV : Cette contrainte de dessiner un strip quotidiennement ne génère-t-elle pas une sorte de frustration lorsque vous avez de la matière pour écrire plusieurs séquences le même jour ?

JK : Je n’éprouve pas ce sentiment car je dessine parfois plusieurs strips le même jour. De plus, je me suis aperçu que la plupart des événements de la vie se produisent plus d’une fois. Si je passe à côté de quelque chose un jour, je pourrai écrire sur cet événement tôt ou tard car il est voué à se répéter. Il y a parfois certaines situations que j’observe et dont j’attends qu’elles se produisent à nouveau car je sais que je pourrai les évoquer à ce moment-là. Ce ne sont pas forcément de grandes choses, ce sont parfois des petits détails de la vie de famille.
2008 marque la dixième année d’American Elf. Je pourrais avoir atteint ce stade du projet sans même m’être posé une seule question sur une telle entreprise. Cependant, j’ai toujours tenu à m’aventurer dans de nouveaux territoires. Et ce sans compter sur ma vie qui semble s’aventurer d’elle-même dans des contrées inexplorées : mon épouse Amy et moi venons d’avoir notre second enfant.

NV : La naissance d’Eli, votre premier enfant, marque à mes yeux un tournant dans l’écriture d’American Elf. Avec son arrivée, j’ai le sentiment que l’aspect «magique» de votre œuvre (peuplé de personnages à l’apparence d’elfes ou d’animaux) et l’aspect plus «réel» (veine autobiographique) se confondent totalement. Eli vous apporte une sorte d’émerveillement constant qui prend le pas sur votre besoin d’altérer votre représentation du réel.

JK : La naissance de mon premier fils m’a permis en grande partie d’unifier tous les aspects de ma vie. Etre père et artiste m’a vraiment aidé en cela. Le travail et le jeu ne font plus qu’un… Je dessine nos parties de jeux et d’aventures, nous dessinons alors que nous jouons. Mon métier est de dessiner et dessiner est un jeu.
Le réel et l’imaginaire sont aussi réunis. Tout ce que nous faisons est magnifié et intensifié par le spectre de notre imagination pour devenir quelque chose de différent, de plus captivant, de plus magique.
Tout est magique dans mes bons jours en tout cas… Lorsqu’ils s’assombrissent, je vis dans un véritable cauchemar. Mais je compte plus de bons jours que de mauvais.

NV : Cela rejoint en partie le travail de Lewis Trondheim que le Comics Journal[8] décrivait comme «étant proche de l’écriture manuscrite, aussi naturel que la respiration, aussi spontané que la vie». Tentez-vous d’atteindre ce même résultat au travers de vos carnets ?

JK : Tout à fait. Il n’y a pas de séparation entre l’art et ma vie. Maintenant que je parviens à vivre de mes bandes dessinées, il n’y a plus non plus de séparation entre le travail et le jeu. Comme je le disais précédemment : le travail, le jeu, l’art et la vie ne sont qu’une seule et même chose à mes yeux.

NV : Dans American Elf,[9] vous créez d’ailleurs un strip à partir d’une dédicace de Lewis Trondheim. Comment avez-vous découvert ses albums ?

JK : Si ma mémoire est bonne, j’ai dû les découvrir dans une librairie à Montréal qui n’est qu’à deux heures de là où je vis. C’était à une époque où j’achetais de nombreuses bandes dessinées en français même si je ne maîtrise pas votre langue. Il m’a fallu près de six mois pour lire Lapinot et les Carottes de Patagonie armé de mon dictionnaire français-anglais.

NV : Appréciez-vous d’autres bandes dessinées européennes ?

JK : Astérix était l’une des mes séries favorites lorsque j’étais enfant. J’ai commencé à acheter les albums bien avant qu’ils ne soient disponibles en anglais. Mon père m’emmenait à la librairie de l’Université de Dartmouth et je choisissais quelques albums de l’édition française. Je parvenais malgré tout à comprendre une bonne partie des histoires. Cette série m’influence encore lorsque je travaille sur des albums humoristiques.
L’autre classique européen que j’adorais était les livres des Moomin[10] (pas les bandes dessinées mais les romans).
J’ai aussi découvert les Schtroumpfs mais au travers des jouets. Je les aimais beaucoup et, lorsque les adaptations en dessins animés sont apparues, je fus ravi. Je m’amuse encore avec le jeu vidéo des Schtroumpfs sur mon vieil Atari. Pour autant que je sache, les albums originaux n’ont jamais été publiés aux Etats-Unis. J’aimerais pouvoir découvrir cet univers.

NV : Vous avez baptisé votre GameBoy Advance du nom de Milou. Hergé fait-il aussi partie de ces auteurs qui ont eu une influence sur votre travail (comme dans l’aventure de Pinky & Stinky[11] sur la Lune) ?

JK : Tintin est pour moi la meilleure bande dessinée d’aventure. Dès que je dessine une bande dessinée dans ce genre, Hergé m’apparaît indéniablement comme une influence majeure. Lorsque j’essaie de créer un petit monde pour y faire exister mes personnages, je pense souvent à la façon dont il assemble son univers. Je désire créer un monde vivant et coloré comme le monde d’Hergé peut sembler vivant et coloré. Je ne veux pas que mon univers ressemble au sien, je désire simplement qu’il attise l’imagination de la même manière.
Et Milou est mon personnage préféré de l’univers de Tintin car il n’aboie pas de la même manière que les chiens américains…

NV : Vous souvenez-vous de votre première rencontre avec l’œuvre d’Hergé ?

JK : Oui. Mon père était rédacteur en chef d’un journal et l’éditeur américain de Tintin lui avait envoyé des copies de presse de l’album. Mon père me donna Le Trésor de Rackham le Rouge. Je l’ai adoré mais je me suis plaint du fait qu’il s’agissait de la seconde partie d’un récit qui en comportait deux. Il est monté et est redescendu avec la première partie ainsi que Le Sceptre d’Ottokar et Le Crabe aux Pinces d’Or. Ce fut un jour merveilleux. J’étais passé en une journée de l’ignorance complète de Tintin à une immersion complète dans son univers.

NV : Dylan Horrocks[12] est fasciné par le dessin d’Hergé «où tout semble parfait et défini par des lignes simples et claires». Partagez-vous le même attrait pour son style ?

JK : Je ne suis pas attiré par cet aspect de perfection mais plutôt par la puissance de la simplification. Ce qui me passionne, c’est de parvenir à bâtir un univers complexe à partir d’éléments de construction très simples. A l’image de notre univers si simple et si complexe à la fois.

NV : Dans votre troisième carnet, vous insérez pourtant plus de détails dans vos dessins (comme les rayures de votre chat Spandy qui apparaissent soudain au détour d’un strip). En 2007, vous vous dessinez de manière plus réaliste puis soudain vous retournez à un style plus naïf. Quelles sont les raisons de ces modifications stylistiques souvent très marquées ?

JK : Je suis incapable de tirer une quelconque satisfaction d’un style qui serait devenu statique. Je me suis simplement aperçu un matin que je ne dessinais pas les rayures de mon chat. J’ai donc décidé de représenter Spandy de manière plus réaliste. Je ne m’étais jamais rendu compte que ce détail manquait dans les deux premiers carnets. Au fil de l’écriture d’American Elf, de nombreuses «révélations» du même type se sont produites. Elles sont d’ailleurs plus souvent liées à la découverte de la signification profonde des choses qu’à celle de l’absence de certains détails physiques.

NV : Vous écrivez dans l’introduction de votre premier carnet que «la vie ne possède pas la structure d’une narration de type classique». Vos strips vous permettent-ils d’expérimenter une voie nouvelle ?

JK : Je tente simplement de produire une forme d’art qui serait plus proche de celle de la vie. La narration classique est une construction très artificielle qui ne m’est d’aucune utilité lorsque j’explore mon quotidien.

NV : Les premiers carnets d’American Elf sont dessinés en noir & blanc. Vous travaillez désormais en couleurs. Cette technique est-elle votre nouveau «terrain de jeu» ?

JK : Je suis passé à la couleur sur American Elf en 2002 lorsque j’ai lancé le site. La couleur a toujours une sorte de pierre d’achoppement dans mon parcours artistique. Cette situation a changé grâce à l’informatique. Travailler tous les jours sur un ordinateur m’a permis de tester de nombreuses gammes de couleurs sans avoir à me préoccuper des conséquences (il suffit simplement de cliquer sur la touche «undo»). Je crois que je maîtrise désormais relativement bien l’usage des couleurs. Elles m’apparaissent maintenant comme étant intuitives, naturelles et personnelles. J’adore m’atteler à cette partie de mon travail.

NV : Vous vous permettez une grande liberté dans votre rapport au dessin et à la couleur. Un dialogue avec votre épouse[13] laisse cependant penser qu’il existe quelques règles qui définissent les limites de la représentation de votre intimité.

JK : Il n’y a aucune règle. Je crois ne m’être jamais représenté en pleine masturbation. J’ai certainement dû y faire allusion. Je l’ai même peut-être dessiné mais alors je ne m’en souviens plus. Je ne prête plus aucune attention à ce que j’ai pu écrire. J’avance toutes voiles dehors, sans jamais regarder vers l’arrière.

NV : La représentation de votre intimité dans vos strips trouve un écho particulier lorsque l’on sait que vous exposez aussi votre «intimité» en chantant sur scène. Ôter vos vêtements lors d’un concert de rock tient du même rapport de dévoilement ?

JK : J’ai le sentiment que le rapport est différent. Un concert rock demande une forme d’énergie qui mène parfois à se défaire de certains de ses vêtements. Je ne m’expose donc pas plus ; je me plonge entièrement dans le «Rock & Roll». Si j’y réfléchis d’une manière rationnelle, je préférerais ne pas en arriver là mais l’énergie du spectacle ne me laisse pas le choix…
Dans mes carnets, je n’ai pas non plus le sentiment de vouloir me révéler au lecteur. Je tente simplement de creuser au plus profond de moi. J’essaie d’en apprendre plus sur moi, d’atteindre une forme d’acuité «magique».
Ni les concerts de rock, ni les carnets n’ont pour dessein de me révéler. Si je me retrouve finalement «à découvert», je crois que cela n’est le résultat que d’un effet secondaire…

NV : En dehors de la bande dessinée et de la musique, vous réalisez aussi de nombreuses peintures. Une sélection de vos toiles sera réunie dans l’ouvrage Little Paintings. Top Shelf présente votre relation à ces tableaux de formats réduits comme tenant d’une «obsession dévorante». Ce médium vous permet-il de répondre à un besoin qui ne serait pas comblé par les deux autres ?

JK : Le terme d’obsession dévorante est un peu exagéré. L’an passé [en 2007], j’ai travaillé de manière plutôt intensive sur la production de nouvelles toiles afin d’être prêt pour deux expositions.[14] Les carnets restent cependant mon projet le plus important. Les tableaux ne viennent qu’en deuxième position.
Mes toiles répondent à un certain besoin mais d’une autre manière. J’aborde dans la peinture les mêmes problématiques de l’existence mais au travers d’une voie plus symbolique.

NV : Les grandes icônes américaines (la bannière étoilée ou les logos d’entreprises comme McDonald’s) font de nombreuses apparitions dans vos albums. Quel est votre rapport avec la société américaine ?

JK : Je suis américain et ces symboles trouvent donc une profonde résonance dans ma vie quotidienne. Mon père m’a inspiré des sentiments proches de l’exaltation pour McDonald’s. Je me souviens que lorsque j’étais enfant nous allions dans ce restaurant et il nous disait : «Vous imaginez qu’à cet instant des gens partout en Amérique mangent au McDonald’s exactement comme nous». La notion d’être lié à tous les citoyens de ce pays était très forte dans un moment comme celui-là. Bien sûr, mon père disait cela dans un trait d’humour. Mais en tant qu’enfant, j’éprouvais un sentiment patriotique très profond.

NV : Vous avez accepté que sept de vos strips[15] soient réédités dans l’ouvrage 9-11 : Emergency Relief[16] pour «soutenir l’effort de guerre». Cela tient-il du même sentiment patriotique ?

JK : Pas du tout ! Mes allusions au «soutien de l’effort de guerre» dans mes strips étaient entièrement sarcastiques. Nous étions désemparés après les attentats du 11 septembre 2001. Nous étions anéantis et en larmes avant d’être soudain envahis par un sentiment de jubilation maniaco-dépressive. Mes strips n’étaient que l’expression de ces émotions. Ils faisaient partie d’une démarche visant à maintenir mon équilibre mental, équilibre que je ne suis toujours pas parvenu à recouvrer entièrement (même si cela peut vous paraître difficile à croire).
J’en suis arrivé au point de penser que les Etats-Unis pourraient totalement sombrer dans l’anarchie avant la fin de ma vie. Je prie pour que cela n’arrive pas. Nos vies seraient alors plongées dans un véritable enfer.

NV : Vous avez récemment abordé la revisitation d’une autre grande icône américaine, celle du super-héros. Votre série Super F*ckers,[17] bien qu’étant liée à votre goût d’enfant pour ces lectures, est bien loin de reprendre le même type de figure héroïque. Vos personnages sont des adolescents névrosés, drogués et violents. Super F*ckers apparaît presque comme une satyre sociale de l’Amérique contemporaine.

JK : J’ai réfléchi durant des années au fait que toutes les choses sont liées entre elles. Je voulais écrire un roman graphique complexe et aux proportions pharaoniques qui me permettrait de développer ce concept. C’est à la même période que j’en suis arrivé à définir ce que j’appelle ma «Théorie de l’Univers Maléfique».[18] Pour faire simple, cette théorie est basée sur l’idée que tout est néfaste et que tout acte est un acte de guerre. La paix et la bonté ne viendraient donc que du vide et du désœuvrement.
Lorsque j’ai entamé Super F*ckers, je me suis aperçu que la série tournait au récit de super-héros un peu loufoque. Le sens profond de cette histoire parvient cependant à se dégager de ce fouillis. La plupart des événements relatés dans cette série sont inspirés directement de mon expérience d’étudiant. Ils sont bien entendu exagérés pour le besoin du récit.

NV : Cette théorie est-elle née après le 11 septembre ? On pourrait y voir une forme de critique de la politique extérieure américaine (depuis les interventions des Etats-Unis dans les pays arabes jusqu’au 11 septembre et des attentats à la guerre en Iraq) ?

JK : Peut-être. En fait, pour les Américains, tout est lié au trauma du 11 septembre. Nous prétendons aller bien alors qu’en réalité nous sommes mal barrés.
Ma théorie de l’Univers Maléfique s’étend cependant jusqu’au niveau cellulaire. Et même plus loin. Je n’ai donc pas le sentiment qu’il soit directement lié aux problèmes de géopolitique.

NV : Avez-vous le sentiment que votre travail sur les strips d’American Elf a modifié votre manière d’écrire des romans graphiques ?

JK : American Elf m’a permis d’unifier les différents aspects de ma vie. Ces carnets m’ont donné une base stable qui m’offre la possibilité d’être plus libre sur mes autres travaux. J’ai le sentiment de pouvoir tout me permettre.

[Entretien réalisé fin janvier 2004 et début janvier 2008.]

Notes

  1. L’éditeur de Chester Brown, Joe Matt et Adrian Tomine…
  2. L’éditeur de Craig Thompson et plus récemment d’Alan Moore.
  3. Conversation #1 : Kochalka/Thompson, Top Shelf, 2004.
  4. Auteur de Clumsy et Unlikely publiés en français chez Ego comme X.
  5. Auteur de Blankets : Manteau de Neige en français chez Casterman (Ecritures).
  6. Tom Devlin travaille aujourd’hui pour Drawn & Quarterly, Highwater Books ayant cessé ses activités en novembre 2004.
  7. Auteur de Bone édité en français chez Delcourt.
  8. In The Comics Journal Special Edition Summer 2002.
  9. A la date du 23 juillet 2000.
  10. «Essentiel» et «Prix du Patrimoine» au Festival d’Angoulême 2008, Moomin et les Brigands est publié en français aux éditions du Lézard Noir.
  11. Pinky & Stinky, James Kochalka, Top Shelf, 2002.
  12. Auteur de Hicksville paru en français à l’Association.
  13. Strip du 1er juillet 2001. Réplique de James Kochalka : «Je sais que je ne suis pas censé nous dessiner en train de [faire l’amour] mais aujourd’hui je vais le faire».
  14. Galeries «Giant Robot» à New York et San Francisco.
  15. Datés du 11 septembre 2001 au 16 septembre 2001.
  16. 9-11 : Emergency Relief, collectif, Alternative Comics, 2002.
  17. Super F*ckers, 3 numéros (en cours), Top Shelf, 2005-2007.
  18. «Evil Universe Theory» (en anglais).
Site officiel de James Kochalka
Entretien par en octobre 2008