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Galopu sauve la terre

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Mattt Konture a trois «t» en son prénom, nécessité moins phonétique que symbolique se présentant comme trois croix d’un autre crâne (Golgotha), ou (plus certainement) comme signes minimales de la trinité l’incarnant dans ses humeurs saisonnières : Mysteur Vro, Ivan Morve et Galopu.

Donnant son nom et son ambition par le titre, c’est le dernier que nous retrouvons dans ces pages colorées, curieux et printanier comme l’avait déjà expliqué son auteur,[1] accessoirement aidé d’un Mysteur Vro festif et estival, à la conscience plus légère mais toute aussi indispensable qu’un peu d’écologie garantit la qualité de ses bonheurs psychédéliques et musicaux. Ivan Morve, lui, plus gris que jamais, ne sera croisé qu’au hasard d’une case, perdu et bougonnant dans un rayon de supermarché l’entraînant dans les angoisses et frustrations de la surconsommation.

Mattt Konture, longtemps en automne hiver, le Morve en tête, a éternué un bon coup et s’est repris dans les saisons chaudes, assumant et armé de cet underground et monde alternatif qui entretiennent son talent, sa culture et son identité. Une maturité, une acceptation de soi peut-être aussi, où conscience, urgence et confiance se rejoignent pour avoir le désir d’agir et de couleur (verte principalement).
De son personnage aussi lippu que parleur, il explique par l’agir au quotidien la plus grande découverte du siècle dernier : nous appartenons à jamais au système fermé, unique, complexe et irremplaçable d’un géoïde de circonférence méridienne de 40007 Kms où toute action massive nous revient un jour ou l’autre comme un boomerang irrattrapable.
Autant, donc, faire massivement des bons gestes, qu’ils entretiennent la planète plutôt qu’ils ne l’abîment, et c’est ce que Galopu nous invite à faire aidé et soutenant la revue Passerelle Eco.[2]

Pour les plus lecteurs de Mattt Konture, son style acquiert ici cette évidence qu’il cachait (pudiquement ?) dans le sombre et le foisonnement des précédents albums. Son message, tout en étant didactique, précis et informé, réussit là où beaucoup ont échoué, grâce à la sincérité de ses convictions qui l’ont toujours caractérisé (voire marginalisé).
L’autre surprise est que ce livre est accessible à la fois à un grand public mais aussi à un jeune public, et ce avec d’autant plus de pédagogie que s’y mêlent certitudes et humour.

Comme beaucoup de discours de nature écologique, ce livre n’a pour seul travers qu’«euphémiser» en prétendant sauver la terre. Car elle, du haut de ses 4,5 milliards d’années, s’en fout. L’humanité, comme les dinosaures il fut un temps, n’est pour elle qu’un épiphénomène de cette étrange choses qu’est la Vie, donnant de belles couleurs à son atmosphère.
Que l’humanité remplace les météores et les volcans par sa bêtise et les poisons qu’elle distille est, finalement, peu de choses. Juste une nouvelle forme de destruction qui ne sera fatale qu’à ce qui n’est pour la planète qu’une innombrable troupe de singes de courtes vies et de vues, se prétendant sages et intelligents.
Avec ou sans nous, la vie sur la Terre persistera, minimale ou florissante, avec une possibilité d’autant de milliards d’années que son âge actuel, avant d’être définitivement avalée par un soleil brillant de ses derniers feux. Le seul problème est donc : avec… ou sans nous…

Notes

  1. «Mes trois saisons» in Ivan Morve, Mattt Konture, Paris, L’association collection «éperluette», novembre 1996, pp. 38-39.
  2. La plus grande partie des planches de ce livre furent publiées dans la revue Passerelle Eco.
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Chroniqué par en décembre 2005