Nobrow n°8

de

Depuis son numéro 6, la revue Nobrow est double et a deux couvertures : l’une pour les bandes dessinées, l’autre pour les illustrations. Ce huitième numéro n’échappe pas à cette règle, ni à celle qui consiste à lui donner une thématique générale, que les auteurs invités auront à charge d’aborder ou d’illustrer. Pour ce dernier numéro de 128 pages, c’est l’hystérie qui a été choisie et proposée à 32 illustrateurs et 14 auteurs de bande dessinée.
Ce sujet est abordé dans ses multiples définitions, que ce soit les angoisses personnelles (Luke Pearson par exemple), la folie des foules (Kyle Smart), ou bien la simulation de troubles (Dilraj Mann & Laura Halliwell). Même la définition qu’en donnait Platon dans le Timée est évoquée par Matteo Farinella, avec un personnage à tête d’utérus, vagabond dans un corps sociétal plutôt que féminin[1].

La revue est éponyme de son éditeur avec raison. Synthèse exigeante aux formes populaires, elle est à l’image du mot «nobrow», néologisme crée au tournant du siècle pour ne plus être entre le high & low de highbrow et lowbrow.[2] L’éditeur anglais ne se situe plus sur la colline de la connaissance, ni parmi les haut ou les bas du front y participant. Plus de position numérotée pour la neuvième chose ou autre chose, Nobrow en bande dessinée ou en illustration avancerait à front ouvert, sans le visage de ces idées reçues de nature phrénologique.

L’hystérie porte dans son étymologie même, une problématique vieille comme le monde occidental, que l’éditeur londonien, tout à la fraîcheur de son nom, explore par la culture du nouveau monde, allant des  mythologies «sci-fi» aux situations engendrées par le système consuméristes triomphant.
Ce grand écart se retrouve aussi, à un autre niveau, dans la volonté de faire des livres en pointe, à l’avant-garde graphique avec des techniques d’impression et de façonnage revendiquées «anté-numériques»[3].

Nobrow va sur ses cinq ans en novembre. Avec le numéro 8 de sa revue vitrine, il témoignerait non pas d’un flegme trop souvent dit britannique, mais bien plutôt d’une forme de sagesse.

Notes

  1. «L’utérus est un animal qui désire engendrer des enfants. Lorsqu’il demeure stérile trop longtemps après la puberté, il devient inquiet et, s’avançant à travers le corps et coupant le passage à l’air, il gêne la respiration, provoque de grandes souffrances et toutes espèces de maladies.», source Wikipédia.
  2. «Nobrow» semble être un terme inventé en 2000 par le critique du New-Yorker, John Seabrook, qui déplorait dans son livre Nobrow : The Culture of Marketing + The Marketing of Culture, la contamination du «highbrow»  par le commercial «lowbrow». En 2005, le terme  fut repris par l’universitaire canadien Peter Swirski dans son livre From Lowbrow to Nobrow. Pour lui, le «nobrow» serait une forme de synthèse où les deux extrêmes s’accultureraient de manière féconde et innovante. L’éditeur londonien, créé en 2008 par Sam Arthur et Alex Spiro, semble s’accorder à cette dernière définition.
  3. Les éditeurs ne veulent pas non plus vendre leurs livres sous forme numérique
Site officiel de Nobrow
Chroniqué par en septembre 2013